Vous avez un projet ?
Contactez nous !

FIN DE L’INTERDICTION DE LA PUBLICITÉ POUR LES MÉDECINS : DÉCISION DU CONSEIL D’ÉTAT

fin de l’interdiction de la publicité pour les médecins : décision du conseil d’état

Depuis environ 70 ans, les médecins, infirmiers, dentistes, podologues ou sages femmes souffrent de l’interdiction de la publicité dans l’exercice de leur métier. C’est ce qui entraîné beaucoup de débats, depuis quelque temps, et ce, jusqu’à une requête au niveau du Conseil d’État. Dans cette optique, celui-ci a levé dans sa décision du 6 novembre 2019 ladite interdiction. Faisons le point à ce sujet pour vous éclairer quant à la portée de l’interdiction, aux règles déontologiques ainsi que les changements dans le secteur.

Portée de l’interdiction de publicité

L’objet de tous les codes de déontologie est de distinguer les professions de santé de celle d’un commerçant. En ce sens, le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 portant sur le code de déontologie des médecins dispose explicitement en son article 19 que : “La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale.”
Il s’ensuit alors que tout procédé de publicité (direct ou indirect) tendant à pratiquer la médecine comme un commerce est prohibé. Il faut attendre la jurisprudence pour interpréter le code et donner un sens à la publicité. D’après une étude du Conseil d’État, la publicité englobe tout procédé permettant à un médecin de promouvoir commercialement son activité. Seuls les renseignements ou les messages dépourvus de toute valeur marchande peuvent être utilisés par les médecins.

Les restrictions dans l’exercice du métier du secteur médical

Dans le respect de ses obligations quant à l’interdiction de la publicité, le médecin est soumis à certaines règles. Cela concerne d’abord les plaques professionnelles. En effet, le professionnel est tenu de limiter les informations à des mentions factuelles, et ce, via une présentation discrète. Ensuite, pour les feuilles ou imprimés d’ordonnance, seuls les mentions de la plaque, les distinctions honorifiques peuvent y figurer. Si le professionnel dispose d’un site médical, il doit être très prudent dans le partage des informations. Quant aux annuaires à destination du public, ils sont limités aux diplômes d’études spécialisées et aux mentions de la plaque.

Évolution de la situation

Dans le cadre d’un rapport du Conseil d’Etat, portant sur la suppression de l’interdiction de la publicité, plusieurs recommandations ont été relevées. En l’occurrence, la plus haute juridiction a imposé le remplacement de ladite interdiction par un droit à une communication libre avec le public. Cette décision aurait notamment été motivée par le désir des patients d’en savoir plus sur le médecin chez qui ils souhaiteraient prendre rendez-vous. Cela augmenterait l’empathie entre professionnel de santé et patients. D’ailleurs, c’est l’évolution de la jurisprudence européenne qui a permis cette évolution, après avoir jugé contraire au droit européen l’interdiction absolue de la publicité. Mais en définitive, cette décision n’aurait été prise que dans l’intention d’aider le public à choisir un médecin.

Des changements en vue dans le secteur de la santé ?

L’acte médical, les prestations de santé, la vente de médicaments ne rentrent pas dans la catégorie des biens et denrées marchandes. La médecine et les activités médicales de façon générale sont des services destinés à assurer la santé et le bien-être de la population. Néanmoins, suite à une récente étude sur ordre de Matignon, le Conseil d’État envisagerait peut-être de modifier la réglementation actuelle et autoriser les professionnels de la santé à recourir à la publicité pour assurer la promotion de leurs services. Il est donc légitime de se demander si la communication santé va officiellement faire son entrée dans le monde de la santé. Aujourd’hui, faire tourner un cabinet médical de médecin, dentiste, kiné, a un coût important : paiement de charges mensuelles, achat de matériel médical innovant, frais d’informatisation, etc. Un cabinet médical doit être de plus en plus performant et doit foncièrement évoluer en suivant les avancées technologiques de la médecine moderne. Il est très fréquent de voir des cabinets qui n’arrivent plus à amortir leurs investissements en matériel en raison du nombre insuffisant de patients.

Les patients évoluent avec le temps

Autoriser la communication santé permettrait à chaque patient de s’informer sur les services disponibles pour se soigner. Les habitudes des patients évoluent avec leur époque et ce qui était interdit, il y a dix ans peut être non seulement autorisé aujourd’hui, mais plutôt souhaité. Le changement de position du Conseil d’État s’explique aussi par le besoin d’améliorer l’offre en soins et de faire évoluer les services publics dans le pays. Les professionnels de la santé ne bénéficient d’aucune protection particulière, bien au contraire, avec la libération de la communication digitale santé, ils pourraient même se mettre en situation de concurrence les uns par rapport aux autres, et ce dans le but d’améliorer la pratique de l’exercice médical et tirer profit de l’expertise de leurs confrères.

Des dépenses de santé croissantes

La population française dépense de plus en plus pour la santé et cette réalité va peut-être amener le Conseil d’État à proposer des mesures pour fluidifier la communication médicale et autoriser la publicité. En effet, comme dans n’importe quel autre domaine pour prendre la bonne décision, il faut être bien informé. Cela vaut tant pour le choix du médecin que pour le choix d’un traitement. On autorise déjà beaucoup, mais pas tout. Certaines méthodes comme celles utilisées en économie commerciale restent interdites aux médecins et une publicité bien encadrée pourrait s’avérer bénéfique pour les patients. Pour beaucoup de professionnels de santé, cela pourrait représenter un nouveau défi professionnel, en partie parce que cet aspect du métier n’entre pas dans la formation médicale classique, mais plutôt parce que les pratiques commerciales actuelles l’exigent, tout simplement si on l’on désire améliorer la qualité des prestations. Dans la pratique, on constate que de plus en plus de professionnels de la santé ont recours aux blogs, sites internet et réseaux sociaux pour faire passer des messages au public, dans l’objectif de mieux faire connaître leurs compétences médicales. La communication santé et les méthodes marketing santé ont bel et bien fait leur entrée dans la sphère médicale, un phénomène qui était méconnu avant l’ère digitale…